En Afrique, on dit qu'il faut tout un village pour éduquer un enfant. L'auteure, une jeune adulte québécoise, a eu l'occasion de se sensibiliser au fait que cette vision éducative peut jouer des tours à certaines familles africaines qui s'intègrent à une société nord-américaine comme la nôtre - du moins à leurs débuts.
Ici, cette expression peut vouloir dire qu’il est bon pour un enfant d’avoir plusieurs modèles adultes en plus de ses parents. Pour des dames de mon quartier, l’expression ne portait pas à interprétation.
Près de chez moi se trouve plusieurs HLM dans lesquels habitent beaucoup d’immigrants et entre autres, des immigrants d’origine africaine. Les gens du coin se plaignaient souvent des enfants. Ils les trouvaient bruyants. Ils se plaignaient d’entendre constamment pleurer un bébé et ils se demandaient où étaient les parents. J’entendais souvent les gens dire: « Les Africains ne sont pas de bons parents. Ils ne savent pas élever leurs enfants. »
En fait, ces mères ne sont pas incompétentes, c’est seulement qu’elles élèvent leurs enfants comme elles l’auraient fait en Afrique, dans leur pays d’origine. Là-bas, chaque adulte peut intervenir sur les enfants si ceux-ci les dérangent ou s’ils n’ont pas un comportement acceptable. De même, si une mère doit aller faire des courses, elle laisse seul son bébé sans inquiétude, car elle sait que s’il pleure, la voisine viendra le réconforter. Là-bas, l’éducation d’un enfants se fait collectivement et c’est l’affaire de tous. C’est un devoir collectif. Alors qu’ici, l’éducation est privée. C’est un devoir que les parents ne souhaitent pas partager avec la collectivité.
Cette différence n’est écrite nulle part. Quand ces familles africaine ont immigré, nous les avons informées qu’il ferait froid l’hiver, que la langue parlée au Québec est le français. Nous les avons prévenus d’une série de grandes différences, mais tant de nuances ont été omises. Il est évident que l’adaptation, elle, n’est pas évidente!
C’est dommage que les gens de mon quartier n’aient pas cherché à comprendre et qu’ils aient tout de suite qualifié ce qui n’est pas conforme à ce qu’ils connaissent de déficient.
Isabo, Québec (2013-02-12)